Rencontre diurne avec les Centaures

Le soleil lui tapait sur la tête. Il aurait préféré dormir, il détestait bien assez le soleil. Son pelage, qui se mariait si bien avec la nuit, faisait un lourd contraste avec la belle journée ensoleillée. On voyait bien qu'il était plus ou moins à sa place. Malgré la lumière intense qui se reflétait partout, il connaissait bien la forêt de Murmure et appréciait toujours de voir les habitations qui flottaient au-dessus de sa tête, bien qu'aujourd'hui elles furent plus actives que d'habitude, en pleine nuit. Malheureusement, les Centaures préféraient vivre de jour, et il le savait. Monrite en aperçut un au loin. Il l'interpela d'un léger grognement et s'approcha de lui. Il sentait bien que le Centaure était méfiant, cette race l'était indubitablement à tout moment. Elle préférait vivre seule loin des problèmes et des autres.

- Je voudrais m'adresser à votre chef.

Dit-il dans la langue des Centaures en s'inclinant légèrement. Ce peuple-ci, en dehors des félins, était le seul peuple animal pas encore sous sa juridiction. Il devait donc être prudent. Le Centaure acquiesça et lui demanda de le suivre. Il aperçut rapidement plus d'une centaine de Centaures, tous le regardant avec le même air méfiant.

Alors qu'il apercevait à peine le chef des Centaures, derrière le feuillage d'un arbre, Monrite sentait un mouvement furtif mais discret derrière lui. Tout en continuant de marcher, il lança un subtile regard en arrière ; il était bel et bien suivi. Un Draconien probablement. Normal qu'il l'ait remarqué, un loup au pelage sombre en plein jour. Néanmoins, il ne pouvait entamer les négociations avec les Centaures avec un espion dans le dos. Il commença par faire semblant de rien et s'inclina devant le chef des Centaures qui le regardait avec le même regard de méfiance que ses compatriotes.

- Mon nom est Monrite...

- Nous connaissons ton nom. L'interrompit le Centaure.

Avant de poursuivre, Monrite s'approcha considérablement de son interlocuteur. Le Centaure avait rapproché sa main de son arme, mais Monrite n'en prit pas compte. À voix basse, il lui dit :

- Je suis suivi. Là-haut. Pouvez-vous m'en débarrasser ?

- Nous savons que tu es suivi. Répondit-il sur le même ton de voix.

Une flèche décolla et vint frôler Lya avec une vitesse surprenante, assez pour la faire perdre son équilibre. Derrière l'arbre ou elle était perché, un autre Centaure était prêt à la rattrapper.

Lya continuait à observer le grand loup noir et les centaures, assise sur sa branche en balançant les jambes. Ils semblèrent se chuchoter quelque chose, comme pour ne pas se faire entendre puis, sans prévenir, une flèche venue de nulle part vint la frôler et lui fit perdre son équilibre. La flèche explosa pendant que la jeune fille basculait vers l'arrière. Heureusement, ses mains effleurèrent le dessous de la branche et s'y agrippèrent comme de la colle extra-forte. Ses jambes décollèrent à leur tour du haut de la branche pour faire un grand arc et se retrouver de part de d'autre de ses mains, bien fixés sur la branche. Son corps faisait a présent une forme d'arc, le dos faisant l'intérieur de cette drôle de forme. Elle pouvait ainsi voir ceux qu'elle observait déjà plus tôt. Enfin, elle se laissa tomber et se rattrapa à une branche juste en dessous avec ses mains. Les pieds pendant, elle se balançait dans le vide, tenue par seules se deux mains. Elle s'addressa aux créatures qui se trouvaient devant elle.

-Bonjour! J'm'appelle Lya! Et vous? Est-ce que je vous dérange? Oui hein? Ah... Ça arrive souvent... C'est que j'suis très curieuse et là bhen j'vous ai vu alors j'me suis arrêtée pour voir...

Monrite haussa un sourcis et inspecta de haut en bas la jeune fille en se posant de drôle de questions. Pouvait-elle être une ennemie ? Elle n'en avait pas l'air, mais comment être sûr de ne pas tomber dans un piège ? Cette petite gamine trop curieuse venait de tout gâcher. Il n'oserait pas la tuer, car elle n'avait pas l'air de danger imminent. Mais en même temps, il ne pouvait continuer son entretien avec cette espionne dans les parages. Le Centaure prit la parole le premier :

- Nous savons que tu es curieuse. Maintenant déguerpis !

Comme elle ne devait sûrement pas connaître la langue des Centaures, Monrite interprêta pour elle.

- Il te dit de t'en aller. Et il est fort conseillé que tu lui obéis.

Il lui lança à l'appui un regard rouge étincelant. De quoi effrayer un dragon. La situation se présentait d'une curieuse façon. Alors qu'il ne cherchait qu'à rallier les Centaures à sa cause, peut-être aurait-il maintenant l'obligation de regarder une probable alliée mourir devant lui. La curiosité peut être parfois un vilain défaut... Mais il est tenace. Monrite était prêt à parier fort qu'elle refuserait de quitter, ou bien qu'elle reviendrait peu de temps après son expulsion. Monrite soupira. Ce climat de méfiance qui baignait la planète ne lui plaisait guère.

Le centaure sembla lui parler, mais comme elle ne parlait pas la langue des centaures, elle ne le comprit pas. Le grand loup noir lui traduisit, en la regardant avec ses yeux rouges. Son regard lui donna un frisson, bien qu'elle ressentit plus d'émerveillement que de peur. Elle garda son sourire, elle s'attendait à devoir partir.

-Ah! Au revoir alors!

Lya se hissa sur la branche à laquelle elle était "collée" par les mains, monta un peu plus haut dans l'arbre et commença à sauter de branche en branche, s'éloignant du loup et des centaures. Elle s'arrêta seulement quatre arbres plus loin et se coucha sur une branche, regardant le ciel et les nuages à travers les feuilles de l'arbre.

Il la regarda partir quelques secondes, puis se détourna en tentant le plus possible de l'oublier et de revenir à ses affaires. Peut-être aurait-il gâché la chance de s'entourer d'une alliée supplémentaire, mais il ne pouvait pas prendre de chance pour le moment. Elle aura bien d'autres oppotunités de lui prouver sa fidélité à sa cause plus tard, pour le moment Monrite marchait sur des oeufs avec ces centaures.

- Cette planète ne mérite pas un tel chaos. Ce totalitarisme dragonien est une abomination. Et votre territoire finira par payer le prix aussi. Saurais-je compter sur votre support ?

Adressa-t-il finalement au chef des Centaures. Celui-ci se massa la barbiche de sa main droite, réfléchissant. Il interpela ces plus fiers conseillers et discuta plusieurs minutes au loin. Monrite profita du moment d'attente pour observer les Centaures. Ces créatures étaient tellement prêt des autres, il coopérait. Bien que leurs relations étaient froides et difficiles à l'extérieur, elles étaient plus qu'excellente à l'intérieur. Tous s'aimait les uns et les autres, et ils tenaient fermement à leur territoire. Le chef revint vers lui. Il n'avait pas changé de mine, Monrite ne put distingué le résultat dans son visage. Puis, le Centaure s'affirma enfin :

- Nous vous aiderons. La fureur centaure s'acharnera contre ce dragon.

Monrite s'inclina, satisfait.

- Merci infiniment. Vous saurez, le moment venu, quand intervenir.

Puis, il se retourna pour partir d'ou il était venu, dans la forêt sombre. Les Centaures leur jetaient maintenant un regard plein de respect, un regard d'aillié.

Lya soupira. C'était plus fort qu'elle, elle devait retourner voir le loup. En plus, elle ne supportais déjà plus de rester à rien faire sur cette branche. Regarder le ciel, c'était bien, mais pour elle ça devenait très vite très ennuyant, surtout quand les nuages ne bougeaient pas et n'avaient pas de formes étranges. Elle se releva donc sur sa branche et se dirigea vers l'endroit ou elle était un peu plus tôt, mais s'arrêta juste avant, dès qu'elle vit l'énorme loup. Il avait finit sa discussion avec les centaures et s'en allait. Lya se déplaça jusqu'à être à deux arbres du loup, juste en avant de lui et s'assit sur une grosse branche, à trois mètres du sol, l'observant. Mais Lya ne restait jamais silencieuse très longtemps (c'est bien trop ennuyant le silence) et elle ne pu s'empêcher dire tout ce qui lui trottait dans la tête.

-J'vous ai beaucoup dérangé? Je suis désolée hein, mais c'est plus fort que moi... Est-ce que j'vous dérange maintenant? Vous pouvez me le dire, ça ne me dérange pas, j'suis habituée. Vous êtes vraiment grand pour un loup!...

C'est alors qu'elle vit un écureuil qui mangeait une noix sur la branche juste au dessus de celle où elle était assise. Elle se leva pour le voir de plus près et commença à l'observer, oubliant qu'elle était sur une branche et qu'elle devait garder son équilibre. Donc, bien sur, elle perdit celui-ci et tomba de sa branche avec un petit cri aigu. Cette fois ci, elle ne réussi pas à se rattraper à une branche et c'est sur le sol qu'elle finit sa chute.

-Awch... Il était chou cet écureuil...

Elle s'assit en indien et se retourna vers le loup noir qu'elle recommença à observer.

Monrite observa attentivement la jeune fille agir, essayant de découvrir ce que son caractère cachait. Elle était vraiment direct, ne cherchait pas ses mots dans des dimensions autre que la simple compréhension. Il connaissait ce genre de caractère, mais l'avait rarement vu chez des mortels de ce type. Il haussa les épaules, puis affirma sèchement :

- La forêt de Murmure n'est pas un lieu pour les enfants et tu devrais encore moins te mêler des affaires qui se passent entre les différentes races. Ce pourrait être dangeureux pour toi...

Sur ce discours typique, il passa son chemin en sautant d'un bond au dessus d'elle. Il ne jeta même pas un regard sur sa réaction, la laissant à ses interrogations. Le monde de Flaem s'entredéchirait, il n'y avait pas de place sur ce champ de bataille pour une jeune fille qui répondait d'une maturité d'une fillette de 10 ans. L'avenir serait noir, très noir. Il était inutile que ce noir absorbe également une âme aussi jeune, aussi brillante. La guerre était un milieu de vieilles âmes...

Comment pouvait-il l'insulter comme ça? Elle était peut-être énervante, mais ce n'était quand même pas une raison. Elle ressentait un mélange de tristesse et de frustration. Ses cheveux et ses yeux virèrent au jaune orangé pétant, ainsi que sa peau, mais simplement une légère teinte, simplement assez pour que quelqu'un de très attentif le remarque. Elle se releva, se retournant vers le loup.

-Eh attendez!

Une explosion retentissante jaillit alors du sol, à 20 centimètres à peine du grand loup noir, juste devant son museau.

-Premièrement, j'ai peut-être un air enfantin, mais vous saurez que j'ai 17 ans. Ensuite, je me suis mêlée de rien, j'ai juste dérangé et pour finir il n'y a pas grand chose qui soit dangereux pour moi, c'est plutôt moi qui suis dangereuse pour tout ce qui existe. Alors monsieur le loup, vous pouvez bien m'insulter, mais il reste que vous dites n'importe quoi.

Sur ce, elle remonta dans l'arbre et se coucha sur la plus grosse des branches. Les bras croisés et regardant le ciel, la surfemme gardait une mine fâchée, mais ses couleurs devenaient lentement pastel, signe qu'elle se calmait un peu.

Monrite s'arrêta aussitôt que l'explosion lui sauta au visage. Il l'écouta jacasser comme une enfant encore, puis tourna la tête vers elle. Ses yeux rouges étaient luminescent de flammes, de flammes de colère.

- Que dis-tu ?

Affirma-t-il par pure provocation. Il poussa un hurlement vers elle, et de sa gueule jaillit une vague de feu qui fondit sur elle, menaçant de calciner jusqu'à sa chaire si tendre.

- Dangereuse, te dis-tu ?

Il continuait. Elle avait cherché le trouble, elle allait bien sûr le trouver. Monrite était non pas susceptible, mais bien curieux. Curieux de voir la force de cette arrogante qui se croit si forte. Tester son courage, tester son pouvoir : voilà pourquoi il était si agressif et terrifiant avec elle. Pour s'attaquer à lui, elle lui a fallu du cran, mais elle allait devoir lui faire face pour vrai. Le loup se promit de ne retenir d'aucune façon ses coups, malgré le jeune âge de la fille.

*Voyons voir ce qu'elle a dans le ventre !*

Lya observait le loup, qui ne semblait pas très content. Puis, elle vit se jet de flammes foncer sur elle. Lya l'évita de justesse en sautant en bas de l'arbre alors que retentissaient des explosions, de plus en plus fortes, du côté du loup. Elle avait déjà virée au rouge alors qu'elle touchait le sol. Les explosions cessaient alors qu'elle grimpait à toute vitesse dans un arbre voisin de celui ou elle se trouvait plus tôt et qui était maintenant en flammes. Lya était folle de rage. Il ne la croyais pas dangereuse hein? Si elle était capable de faire exploser une église, elle était certainement capable de faire exploser un loup, même gros comme celui-ci.

-Monsieur le loup veut prouver qu'il est le lus fort?

Elle était maintenant tout en haut de l'arbre, regardant autour d'elle pour trouver une branche où elle pourrait facilement sauter. Cela ne lui pris pas de temps, c'était facile à trouver. Elle était prête à esquiver une nouvelle attaque du loup.

Une douce brise se leva et frisa le poil de Monrite tout en faisant frissonner les feuilles. Rien d'autre ne vint percer le silence qui bâtissait une terrible atmosphère. Monrite ne dit mot. Il ne bougea même pas. Il se contenta d'observer en alternance la jeune fille et la braise qui commençait à creuser le bois des arbres atteint. Quelques fois, le bois craquait et de petit étincelle virevoltait en tout sens. Des étincelles de vie, de colère.

*Source d'énergie en elle-même...*

Se surprit-il à penser. Il était pas habitué à ce genre de philosophie. Il détacha son regard et l'éleva de nouveau vers son adversaire. Elle semblait prête à éviter une nouvelle offensive. Mais elle se trompait, il n'allait rien faire. Ni bouger, ni essayer de se préparer à quelque attaque que ce soit.

*Viens, viens jeune fille. Montre moi tes flammes !*